11.05.2022Boire le café avec un policier et parler des soucis de sécurité?
La Police intercommunale de Crans-Montana a joué les précurseurs en Suisse en organisant ces rendez-vous mensuels. Le concept du “Café avec un policier” permet de créer un lien de confiance avec la population. «À ce jour, nous n’avons pas rencontré de personnes virulentes ou de mauvaise foi. L’ambiance est conviviale et sympathique. C’est vraiment l’endroit où le policier est «naturel» et oublie presque qu’il porte l’uniforme», se réjouit Yves Sauvain, le commandant de la Police intercommunale. Échanger, écouter, prendre note des soucis, des souhaits ou autres remarques de citoyens lambda: tel est le but affiché.
La Police intercommunale de Crans-Montana a été la première en Suisse à mettre sur pied le “Café avec un policier”. Depuis, les communes du Chablais ont suivi le pas, puis celles de Genève, Travers (NE) et prochainement Neuchâtel et le Lavaux. Le commandant Yves Sauvain, est fier de préciser: «Le Café avec un policier se veut une rencontre informelle avec la population, dans un endroit sympa. En moyenne, cinq à six personnes nous rejoignent. Le fait d’être dans un espace neutre favorise le dialogue. Ces rencontres ont lieu une fois par mois. C’est pour nous l’opportunité de renforcer les relations entre les citoyens et les policiers; car nous avons remarqué que dans la rue, les gens hésitent souvent à venir nous parler. Peut-être par peur de déranger ou par souci de confidentialité? Mais il faut qu’ils sachent qu’ils ne nous dérangent pas, nous sommes là aussi pour ça!»
Six ans que ces rencontres existent
Chez nous, l’organisation de ce projet pilote a démarré en avril 2016. Le 10 mars dernier, c’était la 43e rencontre; elle se tenait au Relais Fleuri, à Chermignon-d’En-Bas. Le patron du café où a lieu la rencontre place généralement la veille, puis le matin même, un trépied publicitaire indiquant la présence des agents. Les communes concernées mentionnent ce rendez-vous sur leur site internet et/ou au pilier public.
Anticiper les problèmes
Certaines requêtes faites lors de ces rencontres peuvent aboutir à des changements, d’autres ne se justifient pas. «Demande de limitation de vitesse, proposition de déplacer un passage piéton ou un arrêt de bus, demande de mesures limitant le bruit: nous prenons note et agissons lorsque cela nous semble réellement adéquat et possible. Nous arrivons parfois à anticiper les problèmes avant qu’ils ne dégénèrent», relève le chef de poste. Certaines remarques ne sont pas du ressort de la police. Dans ce cas, celle-ci fait le lien entre les services de l’État ou des communes afin de faire avancer un dossier ou trouver une solution (signalisation, sécurisation, etc..).
Vitesse et stationnement
Ce jeudi 10 mars, Malorie arrive avec un petit enfant. Elle est maman de jour et a la nette impression que la plupart des automobilistes ne respectent pas les 20 km/h dans le chemin résidentiel menant à son domicile. Avec ses trois enfants et les six à sept autres petits qu’elle garde, sans oublier ses jeunes voisins, elle s’inquiète pour leur sécurité. Les agents présents l’écoutent. «Lorsque nous sommes piétons, nous avons peine à estimer réellement la vitesse d’une voiture; la vitesse ressentie est souvent plus élevée que la vitesse réelle, lui fait remarquer l’agent Alain Boschung. Mais nous prenons note et allons poser un info-radar. Nous vous tiendrons au courant des statistiques et verrons s’il y a lieu d’intervenir ou pas. Nous espérons vous donner réponse d’ici trois semaines». Comme en écho, deux autres habitants viennent aussi se plaindre du non-respect de la vitesse sur ce petit chemin. Cela semble indiquer l’existence d’un réel problème… La même réponse leur sera donnée.
Manque de places de parc dans certains villages
Le dernier citoyen à venir s’asseoir à table déplore quant à lui le manque de places de stationnement dans le village, avec pour conséquence de potentielles amendes à la clé. En effet, la police passe une fois par semaine pour contrôler le stationnement dans les villages. «Nous prenons en compte le nombre d’habitations ainsi que le manque flagrant de places de parc dans certains villages. Avant de verbaliser, la nuit et les week-ends, nous essayons de tenir compte de la gêne occasionnée pour le passage éventuel de véhicules de pompiers ou de secours, et le danger réel en relation avec le lieu de stationnement».
Une dernière personne, domiciliée à Montana-Village, vient elle aussi rapporter son inquiétude par rapport à la vitesse excessive des voitures dans une rue à proximité de l’école. La même réponse lui est donnée: un info-radar sera installé et après analyse des résultats, décision sera prise de poser un «vrai» radar ou d’organiser une séance d’information si nécessaire.
Police de proximité
La Police intercommunale compte 18 agents et 3 auxiliaires. Grâce à ces rencontres informelles, la population a l’opportunité de mieux faire leur connaissance et de les rencontrer en dehors de toute situation d’urgence, des moments qui génèrent souvent beaucoup d’émotions. Cette proximité est en totale adéquation avec la politique voulue par la police locale.
Article rédigé par Dominique Suter pour la Commune de Crans-Montana
Historique
Ce concept a vu le jour aux États-Unis en 2011, dans la ville de Hawthorne en Californie. Deux ans plus tard, l’activité s’est propagée à travers 175 villes américaines dans 36 états. Le 13 mai 2014, la version québécoise du concept a été amorcée dans six villes. Depuis, douze corps de police ont suivi, dont le Service de la police de la Ville de Montréal. En Europe, plusieurs pays ont rejoint le mouvement, dont la France, la Belgique et les Pays-Bas. Le concept a fait des merveilles pour maintenir et accroître le lien de confiance auprès de la communauté, auprès des partenaires et ce, dans la perspective de la légitimité des interventions policières.
À terme, le commandant de la Police intercommunale Yves Sauvain souhaiterait que les polices municipales valaisannes adhèrent elles aussi à ce concept, comme l’a déjà fait celle du Chablais vaudois.