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19.09.2024«À Crans-Montana, il faut préserver l’équilibre fragile entre gens d’ici et gens d’ailleurs»

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Nouvelle directrice exécutive des Crans-Montana Classics, Isabelle Bagnoud-Loretan est une grande amoureuse de la musique et entend bien entraîner villages, station et visiteurs dans sa passion. En attendant d’assister au prochain concert (le pianiste franco-suisse François-Xavier Poizat se produira à Crans-Montana Classics le 21 septembre), rencontre avec une personnalité au riche parcours dans le domaine des médias et de la culture.


«La musique donne une âme à nos cœurs et des ailes à la pensée. Elle nous fait vibrer, et engage nos émotions, entraîne notre âme», aurait dit le philosophe Platon. Voilà qui correspond au tempérament flamboyant d’Isabelle Bagnoud-Loretan, 58 ans, ci-devant nouvelle directrice exécutive des CMC, les Crans-Montana Classics et leurs rendez-vous incontournables.

«Après 23 ans au Journal de Sierre, dont 8 ans comme rédactrice en chef, c’était le moment de décoller et de passer à autre chose», affirme Isabelle Bagnoud-Loretan. Presse écrite, radio, Isabelle a presque tout fait dans le métier de journaliste et même d’éditrice puisqu’elle a créé la superbe revue «L’Imprévisible» il y a dix ans.

«J’ai adoré mon job, mais il est des opportunités qu’on n’a pas le droit de laisser passer. D’autant qu’en l’occurrence la musique occupe une place importante dans ma vie, et ça, depuis l’enfance.»


Jazz à New York

Et la dame de Randogne de raconter: «Je suis née à Genève, de parents valaisans immigrés au bout du Lac dans les années soixante, à l’époque où il n’était pas facile de trouver du travail ici. On n’était pas une famille intello ou bobo culturelle. Mais la musique était présente. Mon grand-père a dirigé l’Ancienne Cécilia, mon père écoutait volontiers du jazz et j’ai pris l’excellente habitude d’aller au concert dès que j’ai été en âge de le faire. Avec un penchant pour le rock et le jazz.»

Isabelle fera Sciences Po à Genève, et surtout – elle a de la suite dans les idées – s’envolera pour New York. «Histoire de parfaire mon anglais, de tâter de la danse et de la sculpture, et de profiter à fond du jazz d’avant-garde qui se jouait là-bas.»


Disquaire, barmaid et journaliste

De retour au bout du Lac, on la retrouve dans la distribution de disques, dans le célèbre magasin de Jean-Jacques «Giacomo» Busino, personnalité du tout Genève et écrivain primé du roman noir. «C’était l’endroit idéal pour parfaire ma connaissance de la musique, notamment classique.» À la même période, Isabelle écrit également pour le journal de l’AMR, l’Association pour l’encouragement de la Musique impRovisée, où le jazz, encore lui, règne en maître.

En sus des vendanges qu’elle effectue pour son oncle, et du ski qu’elle y pratique l’hiver, le Valais lui fait alors un joli clin d’œil puisqu’à l’occasion d’un concert à Comogne (autrefois lieu de rendez-vous de la jeunesse, au-dessus Randogne), elle rencontre son futur amoureux. Excellente raison de s’installer sur ses terres d’origine, de se marier et d’avoir la première de ses deux filles.


La grande époque de Rhône FM

Isabelle Bagnoud-Lorétan commence à travailler à la radio valaisanne Rhône FM, alors en plein essor. Dans l’animation matinale tout d’abord. Puis elle aura droit à son émission de jazz, et enfin à son émission de littérature.

Elle décide de suivre ensuite la voie journalistique pour décrocher son inscription au Registre professionnel. L’occasion se présente de se rapprocher encore de son district de cœur puisqu’elle entre au «Journal de Sierre», qu’elle finira par diriger. Ce n’est d’ailleurs pas le seul titre dont elle aura la responsabilité puisqu’elle sera le moteur de «La Vie à Crans-Montana», le magazine bisannuel du Haut-Plateau de Gaston Barras, et, nous l’avons dit, de «L’Imprévisible», son bébé, qu’elle a lancé avec deux amis en 2016. «Oui, c’est vraiment mon bébé. J’adorais tout assumer, soigner les moindres détails du programme d’édition et écrire bien entendu.» Sa recette? «On invitait des scientifiques, des écrivains, des artistes. On travaillait autour de thématiques passionnantes: l’autoroute, les stations, la forêt, l’Église.»


Madame la présidente

Isabelle a également coanimé un bureau culturel avec les journalistes France Massy et Patricia Comby, participé à l’organisation des événements du Château de Réchy, assuré de la médiation culturelle au Théâtre Les Halles de Sierre. Sans oublier, peut-être la casquette de présidente du Conseil de la culture de l’État du Valais, qui préavise l’attribution des subventions culturelles. «Une fonction qui m’obligeait à voir beaucoup de spectacles et à rencontrer les artistes. Un vrai bonheur!»


Cosmopolite et internationale

Isabelle Bagnoud-Loretan a donc le profil idoine pour reprendre les rênes des CMC. Mais quel est son vrai rapport avec Crans-Montana: 

«J’aime le fait qu’on y soit partout à cinq minutes de la nature, que la qualité de la vie y soit identique en et hors saison. Et puis, son côté cosmopolite et international qui cohabite parfaitement avec la bienveillance de nos habitants. Un lien toutefois fragile qui nécessite la plus grande attention, qu’il faut préserver à tout prix. Des gens qui se saluent et s’apprécient, c’est rare. Très rare même.»


Programme impressionnant

Pour associer tous les publics, visiteurs, gens de la station et des villages, Isabelle compte s’appuyer sur un programme d’ores et déjà costaud. «Les CMC présentent un prestigieux concert de l’An suivi du traditionnel concert des Familles, quatre concerts en février et le concert de Pâques qui a lieu chaque fois dans un village différent. En été, les concerts des masters classes, deux grands concerts sur le trou N. 13 du golf et trois concerts en septembre. J’ai la chance de succéder à Véronique Lindemann qui a fait de Crans-Montana Classics une réussite grâce à sa gestion intelligente et rigoureuse. Et je peux compter sur un directeur artistique, le violoniste Michael Guttman, professionnel et créatif. Ce n’est pas pour rien, sourit la directrice exécutive, que je ressens une certaine pression au moment d’entrer en fonction.»


Jean-François Fournier