10.07.2022Glenn Van Looy: «Une nature omniprésente, voilà ma définition de Crans-Montana!»
Musicien professionnel, soliste titré de niveau mondial – et sacré meilleur soliste lors du Championnat du monde avec le Valaisia Brass Band ce week-end à Kerkrade – le jeune papa de 31 ans multiplie les concerts et les mandats internationaux, comme la direction de fanfares ou les cours pour le Conservatoire. Rencontre avec le grand maître d’un instrument méconnu du grand public: l’euphonium.
Il n’en existe que quatre ou cinq au monde et s’ils s’apprécient, ils vivent aussi une solide concurrence. Ils, ce sont des musiciens, des solistes, des joueurs d’euphonium, instrument à vent de la famille des cuivres, connu encore sous l’appellation tuba ténor. Citoyen d’Ollon où vit sa belle-famille, originaire d’Anvers, Glenn Van Looy est un authentique virtuose de cet étrange objet peaufiné par le légendaire Adolf Sax dans les années 1870 et qui fit longtemps référence.
Le curriculum de ce professeur du conservatoire pas comme les autres? Des titres prestigieux comme celui de plus jeune vainqueur du mythique British Open Solo, de champion d’Europe des solistes, d’International Soloist of the year lors du Ern Keller Memorial de Sydney, de Player of the year élu par le Brass Band World Magazine, et tant d’autres lauriers, de la Belgique à la Finlande en passant par les Pays-Bas. Et il vient de décrocher le titre du meilleur soliste lors du Championnat du monde à Kerkrade, avec le Valaisia Brass Band (ensemble qui a obtenu le titre de vice-champion du monde).
Le garage et le lit du président
«Mon père Geert était – est toujours d’ailleurs – prof de musique, tromboniste basse et directeur de fanfare. Dès que j’ai pu m’accrocher à ses basques, j’ai assisté aux répétitions le vendredi soir dans le garage du président. Souvent, en fin de soirée, je finissais même épuisé, on me portait dans son lit pendant que les musiciens échangeaient encore. Parmi les enfants qui faisaient la même chose que moi, il y avait mon ami Luc. Il avait jeté son dévolu sur l’euphonium. J’ai décidé de l’imiter et je ne l’ai jamais regretté.
Chez les Van Looy, le brass band est donc une affaire de famille. Glenn a d’ailleurs rencontré Anne, la mère de ses deux filles, dans ce milieu. «Elle est musicienne comme moi. On a alors été confrontés au choix de nous installer soit en Flandres, soit en Suisse. Puisqu’elle est logopédiste, le choix de la langue s’est avéré déterminant: voilà pourquoi nous avons jeté l’ancre à Ollon.» Le couple (alto et euphonium) joue aujourd’hui au Brass Band Valaisia et a créé le VAAG Brass Quartet avec le king du cornet Vincent Bearpark, et avec Anthony Rausis (cornet et bugle). «On fonctionne aux projets, aux défis. On ne se fixe pas d’obligation. Ça rend l’aventure très sympa. Le monde du Brass est du reste très ouvert et amical, en général…»
À noter que la relève pointe déjà. «À deux ans, ma grande ne quitte pas sa trompette en plastique, sourit Glenn. Je précise que la chose est muette… Un jour, nous avons été à un festival et elle a adoré le défilé. Depuis, elle défile dans la maison, la tête droite et son jouet à la bouche. Une future virtuose!»
Un vététiste émérite
La greffe belge a pris sur les coteaux. «À notre mariage, se souvient notre hôte, toute la famille et les amis belges sont venus. On leur a fait découvrir la commune des bisses aux pistes VTT – que je pratique assidument – en passant par les vignes, les caves, les forêts et les lacs. Ils ont été très sensibles à la montagne et à tout le vert qui nous entoure. J’ai un souvenir magique des photos de mariage au bord de l’étang des Miriouges, aux Briesses.»
Sa définition de Crans-Montana découle de cette connexion particulière avec l’environnement: «Pour moi, ce qui séduit et qui rassemble ici, ce sont ces paysages fantastiques. Crans-Montana, c’est une nature omniprésente, puissante, qui fait rêver.»
Ski, fanfares et CDs
«Ce que j’aime dans cette commune, c’est sa mixité. Il y a les villages, leurs sociétés locales, leurs cafés, et leur ambiance chaleureuse. Et puis en haut, la station, internationale, idéale pour les loisirs. On peut tout faire ici. Je ne fais pas de ski, mais je me suis promis que je m’y mettrai quand les filles seront en âge de pratiquer. Pour l’instant, on se contente de promenades au golf.»
La carrière de Glenn Van Looy est un savant dosage de collectif et d’individuel. D’une part, il dirige deux formations, la Stéphania de Sembracher et la Rose des Alpes de Savièse; il est également directeur invité du Brass Band de Lyon qu’il a conduit à la victoire en catégorie excellence aux championnats de France. Et d’autre part, il parcourt le monde comme soliste, expert de jury ou conseiller musical. Autant de mandat qui lui permettent aujourd’hui de réaliser son rêve : être un professionnel qui vit réellement de sa musique. Non sans sacrifice: «À ce niveau, il faut toucher l’instrument trois ou quatre heures par jour, sinon on perd vite la musculation de la bouche et la dextérité.»
Cet itinéraire d’un enfant surdoué l’a amené régulièrement aux antipodes, en Australie où il a même enregistré un disque, en Thaïlande, en Corée du Sud et au Japon. Ou encore aux Etats-Unis. Il compte désormais 4 CDs à son actif, qui couvrent un champ musical des pièces anciennes aux créations les plus contemporaines. «Toujours des morceaux choisis pour leur qualité d’écoute et pour le grand public, souligne-t-il. Je préfère les grands classiques aux numéros de virtuose réservés aux spécialistes.»
Par Jean-François Fournier
Un instrument à son nom
Glenn Van Looy est par ailleurs Performing and Development Artist pour la marque d’instruments Geneva, une firme anglaise qui s’est jadis constituée en réaction à la mainmise d’Adolf Sax sur ce domaine de compétence. «Avec eux, j’ai eu la chance de développer mon propre modèle. Ça se joue sur des petites subtilités, des réglages novateurs et surtout, des alliages de cuivre qui sortent de l’ordinaire.»